17 - La cerise sur le gâteau
Au fil du temps, qui se détend, qui se retend, et qui s’étend. L’on grandit et l’on croit, l’on croît, décroît. Il faut bien que l’on avance, et l’on voit défiler par la morne fenêtre, les lampadaires droits comme des « i », les arbres, les larges bancs, maculés et vides. Le lendemain, les enfants sont des adultes et leurs mains triplent de volume, toujours serrées sur leurs stylos, les fesses collées aux chaises, les coudes vissés aux tables. Les classes sont trop petites.
Et le fil change, rechange, et s’échange. L’on écrit, on décrit, puis décrie. Les mots s’en mêlent, s’emmêlent, démêlent. Il faut bien que l’on avance, et l’on voit cette masse qui grouille, bredouille, dérouille : quelques-uns qui obtempèrent, qui désespèrent, marchent à l’envers. Un fier groupe cependant, qui marche en rang, qui coopère, et dans une autre classe s’engouffre. Ils ne sont pas nombreux. Mais les classes sont trop petites.
Et le temps passe, repasse, trépasse. Les mains scotchées aux livres, les coudes glissent sur les tables, et l’on fait corps avec la chaise ; les statues se pétrifient et froides, et dures, ne s’élèvent plus. Parfois, sous un coup dur elles cassent, et dans un fracas sans pitié dérivent. Et l’on est moins nombreux, encore, dans les classes ultérieures. Mais les classes sont trop petites.
Et l’on nous sème, parsème, essaime. Les mains moites et la vue atrophiée, courbés sur les pages froissées, les coudes usent les tables et les chaises grincent des pieds, sous le poids des années. Pendant ce temps, enfermés, déformés, conformés, leur petit nombre décline, décline, décline. Et puis quelques-uns restent, un petit nombre modeste, une crème fouettée, leste.
Et la cerise sur le gâteau. Mais les classes sont trop petites, et la pâtisserie est indigeste.