12 - Mea sponte
Sponte, voluntariamente.
J’avais parlé. J’avais hurlé. J’avais craqué. Et l’on prétend, pourtant, que l’enfant ne sait pas s’exprimer ? L’idée était clairement passée. Que pouvait-on ne pas saisir, d’un « TA GUEULE » tonitruant ? C’est une tournure simple et sans trop d’artifices. Sans s’encombrer de gants.
Et l’on prétend, pourtant, que l’enfant ne sait pas parler ? Mea sponte : la colère avait dû me sauver.
J’avais parlé. J’avais hurlé. J’avais braillé. Et l’on prétend, pourtant, que l’enfant ne sait pas s’expliquer ? L’idée n’était en fait que trop bien passée. Que pouvait-on dire, lorsqu’entre quatre yeux l’on recevait un : « tu me parles encore UNE FOIS, et je te jette par-dessus bord ! », très sûr de soi ? C’était une menace claire, toute spontanée. Concrète et réaliste, avec des mots d’enfant.
Et l’on prétend, pourtant, qu’il ne connait pas la cruauté ? Mea sponte : c’était dans mon sang.
Je l’avais terrifié. J’avais gagné. Dominé. Et l’on prétend, pourtant, que l’enfant est incapable de vivre en société ? Le dialogue avait bien existé. Que pouvait-on inventer d’autre, pour mieux se supporter, qu’un lien hiérarchisé ? C’était une relation saine, une parole maîtrisée. Mea sponte : je l’avais instaurée de mon plein gré.
J’avais martyrisé. J’avais traumatisé. Je le ferais encore. Et l’on prétend, pourtant, que l’enfant est incapable de structurer ? Mon fief était pourtant très bien ancré. Aurais-je dû me questionner sur les raisons, les motifs, d’une telle méchanceté ? C’était une forteresse stable, un empire pour régner. Mea sponte : j’avais une forte volonté.
Je n’étais qu’une enfant. Une peste. Un garnement. Et l’on prétend, pourtant, que l’enfant est innocent ? Une façade assumée. Comment peut-on imaginer que l’enfant soit différent ? Il est proche de l’adulte, il imite ses agissements. Une machine à torturer, à déchiqueter les gens ; un être dit ignorant dont on pardonne les égarements. Alors, mea culpa : je n’étais qu’une enfant.
Mea sponte : j’étais pourtant un être conscient.